La Fabrique : le livre du futur
La Fabrique est le nom donné aux résidences d’artistes programmées chaque année par notre musée. Participer à La Fabrique, c’est donner la possibilité à un artiste de prendre le temps de réfléchir sur sa pratique, son parcours tout en partageant avec l’équipe et les publics du musée ses influences et son travail au quotidien.
Nous avons proposé à Hadrien Pelletier en 2022 puis à Laura Ben Haïba en 2023 d’élaborer un projet créatif qui questionne ce que peut être le livre du futur et donc aussi, par inversion dialectique, le futur du livre.
On aurait pu s’attendre à un regard croisé porté naturellement sur le rapport ambivalent entre support physique et support numérique du livre. Cette exposition des travaux de Laura Ben Haïba avec ceux d’Hadrien Pelletier montre comment il et elle se sont interrogé·es bien davantage et différemment sur la dimension symbolique et physique du livre et sur cette question centrale et prégnante de l’écologie et de l’économie du livre.
Là où ces artistes se sont pleinement rejoints, c’est sur la ou les matières du livre d’aujourd’hui et de demain. Collecte d’ephemera, ces imprimés des tous les jours recueillis auprès des visiteurs et visiteuses comme autant de trésors personnels, réemploi de chutes de papiers, fabrication de matières plurielles, invention de nouveaux formats où les marges ont autant de valeur que les images et les écrits. Pour Hadrien Pelletier et Laura Ben Haïba, le livre est dès lors pensé comme un objet manufacturé, fait de matières sensibles et intimes qui gardent la trace de nos histoires, de nos émotions, de nos sensibilités.
L’œuvre d’Hadrien Pelletier, diplômé en 2019 de l’École des Beaux-Arts de Nancy, a pour matière première le papier.
De sa fabrication, par le biais de matériaux divers capables d’être réduits en pâte, à sa forme finale, le papier est le support de tout son travail qu’il soit œuvre (tableaux, livres peints) ou véhicule d’idée (impression, travail numérique).
Pendant sa résidence au musée, Hadrien Pelletier a travaillé à partir d’ephemera collectés auprès de visiteurs et visiteuses à la fabrication d’un grand livre, fait de papier artisanal, d’ephemera et d’éléments retirés de la nature. Une fois imprimées, les pages ont été retravaillées comme des tableaux. Reliées entre elles, ces pages font du passé qu’elles conservent et du présent qu’elles occupent un livre-musée, une œuvre sensible à retrouver dans les espaces d’exposition.
Laura Ben Haïba vit et travaille à Lyon.
Elle intègre à son travail artistique une approche scientifique en s’intéressant à de multiples domaines des sciences naturelles ou techniques. Elle produit des dessins, des estampes et des moulages, qui témoignent de son attention à des processus plus ou moins longs comme la fossilisation. En s’appuyant sur des principes de récoltes ou de découvertes au gré de cheminements collectifs qui sont ensuite développés en atelier, elle compose une empreinte de notre temps. Par une vue en coupe du papier et de ses transformations à travers le découpage, le cisaillage et le massicotage, une variété de petits papiers recomposés, ruines d’imprimés plus ou moins anciens, formeront des plages sensibles et fragiles, modestes pages à nouveau imprimables.